LA CONCILIATION ET LES DROITS FONDAMENTAUX


Le conciliateur se doit, notamment, d’être indépendant et impartial au cours de sa mission afin de garantir l’égalité entre les personnes désireuses d’utiliser cette voie d’apaisement, en dépit de leur situation conflictuelle.

Au cours du processus de conciliation, il existe notamment une garantie processuelle fondamentale : le principe du contradictoire entre les parties

La conciliation présente une origine contractuelle. Plusieurs étapes de son déroulement sont marquées par la mise en œuvre de la liberté contractuelle des parties qui consentent à les utiliser (A.). La confidentialité offre de plus,  d’intéressantes potentialités dans la prise en compte d’autres droits fondamentaux substantiels des parties (B.).

A- La liberté contractuelle des protagonistes dans les conciliations : 

La liberté contractuelle figure au rang des droits et libertés fondamentaux de valeur constitutionnelle.

Plusieurs décisions du Conseil constitutionnel l’ont expressément reconnu, en se fondant notamment sur l’article 4 de la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen :  

https://www.legifrance.gouv.fr/loda/article_lc/LEGIARTI000006527429/1789-08-26/

Or, cette liberté constitue le fondement de la procédure de conciliation, dans laquelle la liberté contractuelle des parties se manifeste à deux niveaux :

  • En premier lieu, les parties ont le libre choix de recourir à une conciliation, qui sera alors formalisée par un constat.
  • En second lieu, si une solution peut émerger de la conciliation, elle pourra être formalisée dans un accord contractuel.

Dans le processus de conciliation, les parties peuvent échouer ou réussir.  Autrement dit, elles sont libres de parvenir ou non à un accord et, en cas de succès, de le formaliser par écrit.

Ainsi, il pourra s’agir, d’un simple constat de l’accord trouvé entre les parties. Ce document devra être signé par les parties et le conciliateur.

Le constat écrit sera obligatoire si l’accord issu de la conciliation conduit à la renonciation à un droit (Par exemple, la renonciation à l’exercice d’une action en justice. Cf. art. 1540, al. 2 C. pr. civ.).

Les parties à une conciliation pourront concrétiser leur accord sous la forme d’une transaction, comportant aussi des concessions réciproques.

L’accord issu d’une conciliation amiable pourra être renforcé par les parties, s'ils en demandent son homologation judiciaire, afin de lui conférer la même valeur qu’un titre exécutoire.

Dès lors, l’accord homologué deviendra un contrat judiciaire, doté de la force exécutoire, laquelle autorisera ensuite le recours par l’une des parties aux voies d’exécution si son adversaire ne le respectait pas (article 1565 du Code de procédure civile).

La demande d’homologation de l’accord issu d’une conciliation est présentée au juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire, par requête des deux parties ou de l’une d’elles, à moins que l’autre ne s’y oppose.

 

B- La confidentialité est aussi un élément intéressant, dans la protection de certains droits fondamentaux substantiels dans le processus de la conciliation.

Dans le Vocabulaire juridique, la confidentialité est « ce qui doit être accompli en secret » et constitue une « garantie essentielle » dans le processus de conciliation, conventionnelle ou judiciaire et tous les participants (parties opposées par le différend, les conseils, conciliateur…) sont débiteurs du respect de cette obligation.

 

La méconnaissance de cette exigence par l’un de ces participants, constitue dès lors un cas de responsabilité civile pour faute, laquelle consiste en un manquement à l’obligation de ne pas faire, en l’occurrence à l’obligation de ne pas révéler. (Cass. civ. 1re : 31 mai 2007 ; D. 2007, p. 2784, : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000017831503?init=true&page=1&query=05-19.978&searchField=ALL&tab_selection=all

Or, ni la procédure participative, ni la transaction n’imposent expressément un devoir de confidentialité à leurs participants.

La principale vertu de la confidentialité dans le cadre de la conciliation, est de permettre, en cas d’échec du processus et de saisine ultérieure d’un juge, de ne pas faire état devant lui de ce qui s’est dit ou a été constaté au cours du process.

Outre cet avantage processuel, la confidentialité peut également être appréhendée comme un standard de nature à favoriser la protection de plusieurs prérogatives substantielles des parties à une conciliation.

Plus précisément, deux droits fondamentaux, dont chaque partie est titulaire, pourront trouver une protection indirecte à travers la confidentialité et donc une garantie de leur réalisation concrète et effective : Il s’agit respectivement du droit au respect de la vie privée,  et de leur liberté d’expression :

  • La confidentialité : garantie du droit au respect de la vie personnelle et privée des acteurs dans la conciliation :  la confidentialité permet la préservation concrète de l’intimité de la vie privée des acteurs du différend, en évitant que celui-ci se trouve exposé sur la place publique.  
  • La confidentialité : source d’épanouissement de la liberté d’expression des acteurs de la conciliation

La confidentialité est également de nature à favoriser une expression libre entre les protagonistes de la conciliation.

Les mots, tels que « dialogue » ou « communication » sont employés pour décrire le déroulement du processus, car la conciliation, permet l’échange entre l’émetteur d’un propos et un récepteur, sous l’égide d’un tiers, le conciliateur, dont le rôle consiste à favoriser les échanges, à les encadrer et à en éviter les éventuelles dérives.

La conciliation est notamment propice à l’exercice d’un droit à la critique réciproque des parties qui s’opposent, grâce aux bons offices du conciliateur, ou des avocats des parties.

Dans ce contexte, la confidentialité peut lever des barrières et permettre à la parole des parties de se libérer sans crainte que la teneur des propos tenus soit divulguée à l’extérieur du contexte clos de la conciliation.